Le petit dernier de nos collègues et amis des Editions Hétéroclite vient de sortir, Art Urbain, un guide consacré au graf, au tag et au street-art à Lyon. Celle qui signe l’intégralité des textes et des photos, c’est Sarah Fouassier. Reconnaissable dans les couloirs du Petit Bulletin par ses coups de gueule francs et son rire contagieux. Elle nous a consacré sa première interview !
Sarah, qui es-tu ?
Je suis lyonnaise. J’ai grandi à Lyon, dans le 5e sur la colline. J’ai très vite su que je voulais travailler dans le domaine culturel. Pendant mes études littéraires, en 2014, j’ai créé la revue Sottises. L’idée était de faire collaborer des personnes qui travaillaient dans l’image. On a traité différents thèmes : l’espace public, le cochon, la vierge aussi. C’était assez libre, sans carcan a respecter.
A la fin de mes études, je suis partie un mois aux Etats-Unis pour visiter, faire des photos. J’ai passé 3 semaines à New-York, puis dans la cambrousse où j’ai fait un reportage sur les Amish et leur utilisation des nouvelles technologies. C’est à ce moment là que j’ai senti que je voulais faire ça dans la vie. Parler des gens, de ce qui les passionne. Le terme de journalisme, je ne l’avais pas mais je ressentais un truc.
Je suis entrée au Petit Bulletin quelques temps après mon retour. Je travaillais à la correction et à la vérification du journal. J’ai découvert le fonctionnement d’un journal et j’ai rencontré une équipe super cool. Le rédacteur en chef, Sébastien Broquet, m’a fait confiance assez vite et j’ai commencé par traiter des expos en 2017. C’est à ce moment là que j’ai vraiment mis un mot sur ce que je faisais. Du journalisme. L’année suivante, j’ai commencé à bosser pour le mensuel Hétéroclite. Le nouveau rédacteur en chef, Stéphane Caruana, cherchait quelqu’un pour l’épauler et faire les Unes du journal !
D’où vient ton intérêt pour le street-art ?
Quand j’ai préparé le numéro de Sottises sur l’espace public, j’ai interviewé des graffeurs, des gens qui investissaient la rue. Assez vite, j’ai réalisé que ce qui m’attirait le plus, c’était le graffiti et non le street-art, les fresques… J’aime le graphisme, la recherche de la forme de la lettre, c’est ça qui m’intéresse ! Alors quand on m’a proposé de travailler sur ce guide, j’ai immédiatement tenu à parler de street-art mais aussi de graf. C’est une pratique illégale, qui peut être militante, c’est un art de vivre. Les graffeurs prennent des risques et c’est un univers très mystérieux. C’est fascinant je trouve.
Présente-nous Art Urbain !
L’idée était de proposer des parcours dans la ville où tu es sûr.e de pouvoir voir des oeuvres ! On en a listé 200 au total. Quand tu parles d’un art éphémère et à l’écrit, ça peut être casse-gueule car tout ce qu’il y a en photo dans le guide pourrait ne plus être là ! Ce n’est pas le cas heureusement, mais voilà !
A Lyon, on a mis du temps a libérer des espaces pour la libre expression des artistes. Aujourd’hui encore, il y en a seulement 3 ! Pendant des années, la politique publique voulait que les grands murs soient confiés à CitéCréation, ceux qui font les grands trompe-l’oeil, les fresques. Le mur des Canuts, le mur des Lyonnais… Aujourd’hui tu as une centaines de fresques signées CitéCréation. Ça fait partie de la culture lyonnaise ! Il y a des choses très bien, mais ça n’a laissé aucune place pour le reste.
Gérard Collomb n’est pas réputé pour aimé le graf. Ça a été une volonté d’évincer les graffeurs de l’espace publique. On n’a pas légitimé leur boulot contrairement à d’autres villes, comme Paris, Londres, Manchester, New-York. Lyon se réveille depuis 2015. C’est sur que si on avait eu un maire et un président de métropole passionnés de graf, la ville aurait une autre gueule ! Aujourd’hui, c’est en train de changer, mais ça prend du temps.
Les incontournables à Lyon ?
Celui qui a le mieux mener sa barque selon moi, c’est Brusk. J’ai eu la chance d’aller le voir dans son atelier pour faire son portrait. Il faisait du vandal à la base et aujourd’hui il expose, il est représenté par une grosse galerie parisienne, il est vendu aux enchères. C’est fou !
Niveau street-art, je dirais que les incontournables sont Big Ben, Don Mateo, La coulure.
Si tu passes rapidement à Lyon, je te conseille d’aller dans les pentes de la Croix-Rousse. C’est là où il y a le plus de choses ! Le quartier Debourg aussi, le festival Peinture Fraiche qui se tient là-bas attire beaucoup les artistes.
Les femmes sont aussi dans le street-art les grandes absentes !
Elles font plus du collage, c’est plus rapide. Y’a l’artiste Bouda qui est résidente à Superposition… J’ai interviewé pour le guide la graffeuse lyonnaise M_dangeloo qui vit maintenant à Marseille… On sait très bien que l’espace public n’est pas safe pour les nanas.
L’art urbain est mouvant, il faut l’adapter, à quand une fresque féministe ? Ça reste quand même trop souvent consensuel, décoratif. Il manque de vraies démarches revendicatives selon moi !
Merci Sarah !
Art Urbain est le premier livre de Lyon City Guide. Il est riche de 144 pages, 7 parcours pour découvrir l’art urbain lyonnais, 114 oeuvres photographiées, 15 interviews, 5 portraits, 1 répertoire des ateliers et événements et 1 index des artistes. Vous pouvez le retrouver à Lyon dans des librairies et magasins partenaires ou le commander en ligne. La liste des points de vente et la boutique en ligne se cachent ici : Lyon City Guide.